Extraits d’Alphabête (Les 2 corps éd) avec Laure Missir
A : … à partir de ce jour, l’escamoteur ne sortit plus de sa manche que des cris étouffés ; dans la salle, des femmes suppliaient à genoux qu’on leur rendît l’animalité…
B : … là-bas, entre les bégonias, un corps tapi écume le fumier de la terre ; il rend sa part d’éternité, il dit qu’il n’a qu’un sou d’espoir au ciel et que ça le gratte, au bedon…
C : … la caravane emmêlait ses cheveux dans les essieux, crissait de tous ses sables ; une ou deux enfants broyées faisaient semblant d’avancer…
D : … dos gluant, il osa suspendre sa mue ; on le crut fou plus que nu mais son ventre abritait des ombres d’océan qui parfois saignaient…
E : … et qui vous dit qu’ils poussent dans le bon sens ? N’auront-ils un jour l’outrecuidance de court-circuiter votre élan ? Bas les pattes, couineront-ils, tels des dieux vivants...
F : … il faudrait, pour ne pas s’enliser dans le marc de salive, cesser tout conte et foncer droit sur l’ennemi, la langue entre les dents…
G : … la guerre au scorpion fut déclarée, sous forme d’un libelle auquel manquait le désir de tuer : d’un coup de queue penaude il s’avala tout net…
H : … la bête bleue pinça les cordes de sa harpe quand soudain l’autre main lâcha prise : la mélodie sortit ses pattes de dessous et la salle se leva comme un brouillard...